Dans une interview donnée en début d’année, une société allemande spécialisée dans la chasse au piratage de fichiers pornographiques sur les réseaux P2P avait avoué disposer de l’autorisation d’uploader elle-même les films, pour maximiser le nombre de pirates pris dans ses filets, et les profits. Mais y a-t-il encore piratage lorsque le fichier est distribué avec l’autorisation des ayants droit ?




La semaine dernière nous vous parlions du cas de Daniel Fringer, un développeur de Hanovre accusé selon lui à tort d’avoir téléchargé et partagé sur eMule un film pornographique protégé par le droits d’auteur. L’homme accusait en retour la société qui a collecté son adresse IP d’avoir partagé elle-même le film, pour inciter les « pirates » à le télécharger et les menacer ensuite de procès s’ils ne signent pas un chèque à l’amiable. Détestable, la méthode du pot de miel est bien utilisée au moins par certaines sociétés.


Interrogée en décembre 2009 par Hush-hush, la société Digiprotect spécialisée dans la chasse au porno pirate avait ouvertement admis qu’elle partageait elle-même les fichiers protégés de ses clients dans le but de collecter les adresses IP de ceux qui tentent de le télécharger. « Les studios nous donnent le droit de distribuer leur contenu gratuitement sur des réseaux P2P, ce qui démontre vraiment beaucoup de confiance à l’égard de notre société », se félicitait alors Thomas Hein, gestionnaire de la société. « Avec ces droits nous pouvons poursuivre les téléchargeurs illégaux », ajoutait-il.



Une fois les adresses IP des téléchargeurs collectées, Digiprotect se rend au tribunal pour obtenir une ordonnance à l’encontre des FAI. La société présente ses preuves, et obtient du fournisseur d’accès à Internet qu’il dévoile l’identité des abonnés qui se cachent derrière chacune des adresses IP collectée. Une fois les coordonnées obtenues, il peut envoyer un courrier au pirate présumé pour obtenir de lui un paiement amiable, ou le poursuivre pour contrefaçon.


« Notre taux de réussite est suffisamment élevé pour que tout le monde gagne de l’argent », confiait Hein. Les avocats, les studios, et Digiprotect, tout le monde y trouve bon compte. « Tout est question de combien on peut récupérer, et ensuite le partager. Il n’y pas de risque financier pour le client dont nous protégeons les contenus. Nous payons pour tout, comme les frais judiciaires et juridiques ».


La société disséminant elle-même les fichiers piratés de ses clients sur Interrnet, avec leur bon vouloir, il est certain que le but n’est pas d’empêcher le piratage, mais au contraire d’en faire un business-model à part entière. C’est d’ailleurs ce qui motive le fait de se concentrer sur l’Allemagne, un marché où le P2P est très utilisé et les citoyens suffisamment fortunés pour payer les amendes.


Reste toutefois un problème juridique qui pourrait faire s’écrouler l’édifice. Si l’ayant droit a autorisé la distribution de ses films sur les réseaux P2P, en quoi le téléchargement de ces films par les P2Pistes est-il encore une contrefaçon ?


C’est au pire un acte de copie privée dont la source est cette fois licite, puisqu’elle a fait l’objet d’une autorisation. Seules les redistributions des films (l’upload) seraient illicites, mais Digiprotect semble se contenter de collecter les adresses IP de ceux qui téléchargent chez elle, pas celles de ceux qui partagent effectivement le film.


De plus, par nature, tout réseau P2P entraîne une redistribution par les tiers des oeuvres partagées. N’y a-t-il donc pas une autorisation implicite délivrée par les studios à l’ensemble des utilisateurs du réseau P2P, et non pas seulement à Digiprotect ?


Pour aller plus loin, vous pouvez consulter notre dossier : Le Peer-To-Peer : un pilier de l’économie multimédia




Source : Numerama




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